Fiche individuelle (mise à jour en 2007)
 
Jean COLLINET (1939-2021)
Adresse 1 rue Gauting, 34800 Clermont l’Hérault

Téléphone* 04 67 44 16 93

E-Mail mo.collinet@wanadoo.fr

Discipline Pédologie

Grade* et dernière fonction à l'IRD DR1, chercheur

Langues (l, p, e)   Espagnol (lpe), Anglais (l)
Pays d'affectation   BF, CI, CG, KE, TG, TN
Autres pays bien connus   CN, DZ, KH, Afrique noire
Compétences mobilisables   Pédologie, formation
Activités en cours   Etude sur les sols tunisiens, formation
Rubrique personelle  
    * facultatif
J'ai l'immense tristesse de vous faire part du décés de notre ami Jean Collinet ce 31 décembre 2021.
Jean était malade depuis cinq ans et il a lutté jusqu'à la fin avec un courage admirable et c'est trop difficile pour moi de retracer à chaud son parcours de vie.
Jean était un homme bon, généreux, chercheur remarquable dont les travaux ont bénéficié à tous ses collaborateurs, surtout aux plus jeunes. Il était mesuré et attentif aux autres dans tous ses actes professionnels ou familiaux, il savait rester humble et n'affichait jamais son immense culture.
Jacques Claude

Résumé de la carrière de Jean COLLINET,
Pédologue Orstom, Directeur de recherche de l’IRD

Jean Collinet a été recruté par l’ORSTOM en octobre 1965 à Bondy en tant qu’élève pédologue de 1ère année. Il avait déjà effectué son service militaire et obtenu tous les certificats d’une licence de géologie dynamique.
En octobre 1966, il part au Gabon, accompagné de son épouse Odile, pour accomplir sa deuxième année d’élève, principalement consacrée à des travaux de cartographie et à l’étude de « stone lines » (sujet de son mémoire de fin de 2ème année). Il prolongera son affectation au Gabon jusqu’en 1973.
Il regagne en 1974 la Côte d’Ivoire où il reprend en mains le « grand simulateur de pluie » avec lequel il effectuera, en compagnie de Jean Asseline et de bien d’autres « jeunes », de nombreuses campagnes de mesures sur le comportement hydrodynamique des sols le long d’un transect climatique, depuis la forêt de Taï en Côte d’Ivoire, jusqu’au Niger (région de Maradi), en passant par Sakassou et Korhogo en Côte d’Ivoire), Kongoussi et la mare d’Oursi en Haute Volta (actuel Burkina Faso).
Cette aventure s’arrêtera pour lui en 1980 lorsqu’il sera nommé directeur du Centre ORSTOM d’Adiopodoumé, poste qu’il occupera avec brio, fermeté et beaucoup de diplomatie jusqu’en 1985.
De 1985 à 1988, il sera affecté à Strasbourg à l’Institut de Géologie où il rédigera et soutiendra sa thèse sur « les comportements hydrodynamiques et érosifs des sols d’Afrique de l’Ouest » avant de repartir en affectation dans un tout autre contexte.
De 1989 à 1996 il exercera au CATIE de Turrialba au Costa Rica où il se consacrera à la restauration de sols dégradés au Salvador, ainsi qu’à quelques campagnes de mesures avec un mini-simulateur de pluie.
Fin 1996 il revient à Strasbourg où entre différentes missions d’expertise et d’évaluation on lui confie un enseignement en faculté de géographie.
Début 1998 il arrive en Tunisie pour renforcer la composante sols et érosion au sein du programme « Lacs et retenues collinaires de la Dorsale tunisienne », piloté par Jean Albergel, objet de conventions de coopération avec plusieurs directions du Ministère de l’Agriculture et d’un programme de recherche financé par l’Union Européenne. Il sera rejoint par Jean-François Richard avec qui il co-dirigera près d’une dizaine de thèses menées par des boursiers de l’IRD ou d’autres bailleurs.
Il travaille toujours sur les mêmes thématiques lorsque, en 2002, il rejoint Jean Albergel à Montpellier auquel il apportera toute son expérience et ses compétences pour élaborer le projet d’UR AMBRE qui rejoindra l’UMR LISAH, au gré des réformes successives.
Jean Collinet, atteint par la limite d’âge, prend sa retraite en juillet 2004.
Il nous a quitté le 31 décembre 2021 après un long et courageux combat.

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C'est avec une grande tristesse que nous avons appris hier que Jean nous avait quitté après son long combat contre la maladie. Jean a été un chercheur et un ami que j'appréciais beaucoup, toujours humble et attentif aux autres, il restera pour toujours dans mon cœur.
Avec Valérie nous avons rappelé plusieurs souvenirs : la mission au Mexique (Projet MAB de Mapimi) et les ponchos qu'Odile nous avait aidés à choisir et que nous avons toujours! Notre affectation partagée à Tunis et les nombreuses ballades et séjours dans les ruines romaines, dans les oasis et le jour de l'an 2000 dans le désert! La création de l'UR AMBRE et son aide précieuse pour rédiger le dossier! Notre ralliement au LISAH! Les vacances chez Jean et Odile en Alsace et l'éclipse de soleil entre deux séances sur les données de Kamech!  Lorsque nous avions hébergé Jean et Odile aux Collines d'Estanove à leur retour de Tunisie!
Dr Jean ALBERGEL

Une très triste nouvelle qui m'afflige. J'avais beaucoup d'amitié pour Jean et bien que je l'avais perdu de vue depuis bien des années, j'ai le souvenir de nos échanges toujours agréables et chaleureux.
Paix à ton âme mon cher Jean.
Marc MORELL

Hommage à Jean Collinet
J’ai eu le plaisir d’accueillir Jean et Odile à l’aéroport de San José, il y a plus de  trente ans.
Air bourru, sorte de capitaine Haddock souriant, buriné par l’Afrique profonde, démarche de pédo de l’ORSTOM (et paraboots assorties), il avait de l’allure.
A lui qui savait beaucoup, mais avait toujours plaisir à entendre et comprendre des choses nouvelles, j’ai eu le sentiment de lui mettre le pied à l’étrier de l’Amérique. Il était curieux de tout, mais n’en pensait pas moins. Avec son langage et ses concepts très Africains, il avait du mal à comprendre ces sols jeunes, qui glissaient comme des savonnettes sur la roche mère et créaient des blessures désolantes aux flancs des collines.  Mais quand il a eu pris ses marques, maîtrisé l’Espagnol, il a eu à cœur d’expliquer les processus de surface, en profondeur, au mètre carré et au bassin versant, instantanés et à l’échelle géologique. J’ai eu le grand bonheur de l’enfermer dans une fosse pédo creusée pour lui dans les sols andiques du Nicaragua … Son rapport magistral est en bonne place dans ma thèse.
Jean était gentil et bienveillant. Je l’ai rarement entendu dire du mal de quelqu’un, sauf « les indiens sans plumes », qu’il détestait, collectivement et sans nuances.
Avec Odile, quelle trajectoire. Arrivés tous les deux, ils sont repartis avec trois adorables petites filles, qui leur ont donné le moment venu gendres et petits enfants. Pour mes enfants, il était « Tonton Jean », attentif autant que blagueur.
Admirable Odile, qui l’a accompagné, piloté peut être, pendant cette belle trajectoire d’un demi-siècle, en particulier pendant les difficiles dernières années.
Où qu’il ait été, où qu’il soit maintenant, Jean n’a manqué ni d’affection, ni d’amis, à la mesure de tout ce qu’il a donné autour de lui.
Florent MARAUX, retraité Cirad, agronome spécialiste en généralités.

J’ai connu Jean et Odile Collinet en décembre 1989 – entre Noël et Jour de l’an - au Nicaragua où j’étais en poste pour le compte du Cirad. Le directeur scientifique du Cirad avait commencé la tournée de ses troupes centro-américaines par le Costa-Rica et remontait vers le Nord. Il en profita pour inviter Jean (tout frais arrivé au Costa Rica) à l’accompagner dans sa tournée ; il voulait le familiariser avec  le monde centro-américain, celui des sols bien entendu mais aussi celui de ses habitants et, au passage, de français résidant ou travaillant dans ces pays. Je garde un souvenir impérissable du récit que faisait Jean de cette première traversée « pressé par le temps, sur le trajet Turrialba-Managua, depuis la voiture je devais donner mon point de vue sur la diversité de paysages et sols que nous traversions. Première fois de ma vie où j’ai donc fait un descriptif de sols à 90 km/h ! Je suis fier de moi…. » suivi d’un bel éclat de rire.
La magie de sa stature physique imposante, sa jovialité, ses yeux d’enfant s’émerveillant devant ce qu’il découvrait mais surtout sa gentillesse, son sourire, son empathie et quelque chose d’inqualifiable ont tout de suite opéré, nous sommes devenus rapidement amis, amitié partagée au niveau de nos familles.
Nous nous sommes retrouvés ensuite au Costa-Rica où j’ai été nommé. Notre maison à San José était le point d’attache de Jean et Odile quand ils s’échappaient de leur Turrialba pour la capitale. Et inversement. Nous l’avons suivi ensuite dans ses points de chute successifs, Niederbronn-les Bains, Tunisie, Clermont l’Hérault.
Jean c’est le grand sourire, la chaleur de l’amphitryon qui manifeste son plaisir de recevoir, cet humour si fin accompagnant une envie permanente d’échanger, de discuter, de parler de notre monde, tout en pimentant ces conversations de blagues ou anecdotes, sa passion africaine, son optimisme rayonnant, sa générosité, sa force, son courage.
Jean, tu nous manques.
Henri HOCDE retraité Cirad



Ami Jean, te voilà rendu dans des espaces lumineux et reposants où tu vas pouvoir exercer tes talents d’humoriste.

De même que j’imagine Jean Paul Belmondo (Bébel pour ses fans, dont je suis) y donner des leçons d’acrobatie à des personnes connues sur terre pour leur style compassé, tu pourras ouvrir un cours d’humoristes, avec l’art consommé du regard décalé et amical qui décèle les moindres failles dans les discours, les postures, les attitudes. Si l’au-delà te prévoit un autre séjour sur notre bonne vieille planète, je te verrais bien faire carrière chez les chansonniers, façon « l’oreille en coin dimanche matin », ou les humoristes façon Pierre Dac (« l’os à moëlle ») ou Francis Blanche (« signé Furax »). Combien d’excellents moments n’y ont pas passés les auditeurs des années 50 ? Jean, tu es de cette trempe-là ! Combien de fois ne nous as-tu pas fait rigoler lors de nos rencontres centroaméricaines ?

Car, je le rappelle pour les jeunots et les jeunottes, c’est au Costa Rica que nos chemins se sont croisés, dans les années 80 : tu venais d’y débarquer au titre de l’expansion géographique de la prestigieuse pédologie de l’ORSTOM. Et moi j’y avais amorcé une collaboration avec le CATIE qui a permis des aventures analogues avec des programmes du CIRAD, dont le Café, les Forêts et les cultures vivrières.

Les premiers contacts ayant été sympas et créatifs, nous avons décidé d’une tournée commune dans plusieurs pays centroaméricains, en partant du Costa Rica. Geneviève avait pu me rejoindre, mais Odile était retenue à San José, sans doute par les choupinettes. Cette tournée reste gravée dans ma mémoire par les handicaps que nous avons dû surmonter, dont ceux du franchissement de la frontière du Nicaragua, alors sandiniste depuis peu et harcelé par des « contras » de toutes origines, soutenus par les USA et leurs agences disposant de moyens conséquents. Bref, des no-man’s lands à parcourir à pied, avec nos bagages à la main : de quoi meubler les armoires à souvenirs. Au menu, la découverte de ces agricultures si contrastées entre les confortables plantations de palmiers à huile dans les plaines et les exploitations misérables des paysans coincés dans des espaces restreints de paysages vallonnés. Et bien sûr les sols n’étaient pas les mêmes, ni la façon de les améliorer. Agros et pédos au coude à coude sur le terrain… Et le soir, Carlos Mejia Godoy et ses chansons en soutien aux sandinistes. Geneviève et moi nous croyions de retour dans les penas de Santiago à la suite de l’élection de Salvador Allende, une dizaine d’années auparavant.

Sais-tu, mon cher Jean, que je rêvais d’être pédologue à l’ORSTOM ? C’est historique : en juin 1953, j’ai choisi cette option pour la troisième année de l’Agro. Pénard, je partis crapahuter dans les Alpes. A mon retour, fin août, je trouvais une lettre manuscrite d’Aubert, le patron de la discipline, qui m’expliquait que je n’avais pas été retenu, sans explication. Je téléphone alors à la peu avenante Mlle LIEUBAIL, SG de l’ORSTOM, qui m’explique que cette institution ne pouvait tolérer de recruter un agro sorti dernier de sa promo ! C’était bien le cas : 123ème/123 ! Il est vrai que je m’y étais soigneusement appliqué : la découverte des théâtres parisiens en première année, la Revue de l’Agro en deuxième, et une suite d’amphis super-barbants, à l’exception de celui de pédologie et d’agriculture comparée. Adieu la recherche-pédo, bonjour le développement rural. Soixante-cinq ans plus tard, je ne regrette rien. Mais Jean et moi ensemble en Amérique centrale, quel excellent souvenir !

René Billaz 30 12 2021